Eduardo DE FILIPPO

Comédien, acteur, scénariste et réalisateur italien, frère de Titina et Peppino.

Biographie :

Frère cadet de Titina et de Peppino, il est le fils naturel d’Eduardo Scarpetta et de Luisa De Filippo. Comme ses frère et sœur, il est issu de la vieille tradition scénique du dialecte napolitain que son fils, Luca De Filippo (né en 1948), également comédien, entretiendra vivement sur les scènes napolitaines.

Il est acquis de longue date que le trio “De Filippo” constitue l’un des plus célèbres groupes de comédiens dans le théâtre comique italien, et même s’ils ont travaillé ensemble de nombreuses années, il faut bien reconnaître à chacun une personnalité, tant humaine que professionnelle, visiblement différente des deux autres comédiens.

Très jeune, Eduardo est le témoin de la passion de sa grande soeur Titina pour le théâtre. Le phénomène est contagieux dans la famille. Surtout dans le domaine du comique où ils vont exceller, mais papa “Scarpetta” (dont le nom signifie “petite chaussure” en italien) reste intraitable sur les études ce qui permettra à Eduardo de se forger une solide connaissance de l’écriture. Après Titina, il est le second des enfants à monter sur les planches en compagnie de son père, lui-même célèbre comédien et auteur qui ne fera d’ailleurs jamais de cinéma. Il arrêta définitivement sa carrière théâtrale en 1919.

Eduardo avait une très grande admiration pour ce père qu’il vénérait jusqu’au jour où, alors âgé de 11 ans, il apprit de façon fortuite et orale qu’il était né «de père inconnu». Les circonstances «particulières» de sa naissance (Cf la bio-filmographie de Titina De Filippo) furent pour lui un gros choc psychologique qu’il aura du mal à surmonter la plus grande partie de sa vie.

Il a donc tout juste 4 ans lorsqu’il apparaît pour la première fois sur la scène dans, «La Geisha» et 10 ans plus tard, après avoir étudié avec beaucoup de sérieux le répertoire théâtrale en dialecte napolitain sous la férule de son père, c’est dans la compagnie du «Fratellastro» qu’il fait ses armes professionnelles et ce, jusque dans les années 1920.

Durant les dix années suivantes, son tempérament fougueux et quelque peu confus l’amène à entreprendre, tout azimut, en plus du théâtre, des spectacles de variétés et de revues dans lesquels, ses dons de comique lui attireront presque toujours les meilleures critiques. Il met aussi à profit cette décennie pour s’essayer à la création de textes qui resteront longtemps inédits et dont le plus ancien scénario remonte à 1920; textes qu’il mettra en scène dans la décennie suivante.

En 1929, les trois De Filippo se retrouvent ensemble dans la solide compagnie Napolitaine "Molinari" dirigée par Enzo Aulicino. C’est pendant cette année que va naître le projet de création de leur propre compagnie de théâtre. En 1930, Eduardo présente alors son premier scénario à Molinari qui accepte de le mettre en scène. La pièce s’intitule “Natale in casa Cupiello” (Noël chez les Cupiello). C’est le triomphe. Fort de leurs expériences respectives et désormais reconnus comme des célébrités dans le milieu du théâtre, le trio prend la décision de créer la compagnie “Les De Filippo” qui voit le jour en 1931 et il donne son premier spectacle le 25 décembre de la même année en reprenant “Natale in casa Cupiello”.

La compagnie De Filippo se portait fort bien dans le registre napolitain mais vers 1935, Eduardo, après de nombreux scénarii présentés dans de non moins nombreuses tournées, sentit le besoin d’abandonner le registre “provincial” et de se confronter avec des expressions plus prestigieuses du théâtre contemporain. C’est au sortir d’une rencontre fortuite avec Luigi Pirandello qu’il donna en 1936 une grande interprétation de l’oeuvre de Berretto “A sonagli” et qu’il écrivit sa fameuse comédie “Le vêtement neuf” qui déterminèrent sa nouvelle orientation au théâtre.

Cependant, Eduardo a déjà fait son entrée au cinéma dès 1932 comme acteur et durant les cinq premières années, il tourne dans des comédies comiques populaires qui vont d’emblée imposer son image un peu autoritaire dans le milieu cinématographique grâce à son élégance de charme. Très vite, il comprend tout le parti que le comédien peut tirer de l’image en mouvement dans les situations comiques et, sa grande imagination de scénariste aidant, Eduardo réalise son premier film en 1939 avec «In camapagna é caduta una stella» que l’on peut traduire littéralement par «Une étoile est tombée dans la campagne», titre peu poétique qui ne rapporta à son auteur qu’un succès d’estime.

Il ne se décourage pas pour autant. En 1945, c’est enfin le succès avec «Napoli Milionaria» puis l’année suivante avec «Questi fantasmi!» et, pour ne citer que ces titres, «Filumena Marturano» 3 films tirés des scénarri originaux du théâtre qui avaient été écrits spécialement pour sa sœur Titina. Infatigable, Eduardo y est tout à la fois, l’arrangeur, le réalisateur et l’acteur.

Alors que la compagnie «De Filippo» continue sur la rampe à succès au théâtre, il subit une grosse crise intellectuelle. La déclaration de guerre d’abord plonge l’humaniste dans le désarroi, puis sa brouille avec son frère Peppino qui lui reproche sa grande dispersion dans tout ce qu’il fait, tandis qu’Eduardo reproche à Peppino ses choix artistiques, va contribuer à déboussoler un peu plus le grand comédien durant quelques années. C’est la séparation des deux frères et la création du fameux théâtre «d’Eduardo».

Au sortir de la guerre, en 1948 précisément, il investit tous ses biens dans l’achat du Théâtre San Ferdinando à Naples, théâtre combien riche d’Histoire mais quasiment en ruine et dont la reconstruction durera 6 années. C’est le 24 janvier 1954 qu’il fut inauguré par une œuvre de Palummella. En sauvant la façade 18^e du vieux théâtre, Eduardo avait surtout en tête d’en faire une avant-garde théâtrale pour les acteurs et le public dans la conservation du dialecte napolitain qu’il voulait universel.

La passion cinématographique (Il faisait une évidente différence entre la passion du théâtre et celle du cinéma) avait divisé les deux frères. Après la guerre, ils seront de nouveau réunis quelques années avant la mort de Peppino qui, comme Titina, était sujet à de gros problèmes cardiaques.

Dans les années 1960, tandis que le théâtre d’Eduardo triomphe partout en Europe, il signe plusieurs scénarii pour de grands réalisateurs de cinéma dont le plus connu est celui qu’il arrangea pour son grand ami, Vittorio De Sica «Mariage à l’italienne» scénario qu’il tira tout simplement de sa pièce à succès «Filumena Marturano. Il créa en outre de nombreux personnages comiques qui entraient parfaitement dans l’univers de De Sica, notamment dans «L’or de Naples» ou Tempi Nostri.

La vie privée d’Eduardo De Filippo fut à l’image de sa vie professionnelle: agitée, frénétique et confuse. Après deux mariages malheureux avec Doroty Pennington et Thea Prandi avant-guerre, il trouvera enfin la sérénité en 1977 en épousant Isabella Quaranlotti. Deux années avant cette union, il avait été alerté par des malaises cardiaques durant une représentation qu’il préparait pour la télévision. Le pacemaker qu’il porta ensuite n’atténua nullement son énorme énergie pour le théâtre et le cinéma et, jusqu’au bout, il fut l’homme aux «cent projets utopiques» qu’il avait en tête pour les jeunes générations de comédiens et d’acteurs. On lui doit la fameuse Ecole de dramaturgie qu’il animait à Rome depuis 1981. La mort empêcha l’éclosion de ses autres projets. Il venait d’enregistrer le rôle du «vieux Maître» dans «Cuore» sous la direction de Luigi Comencini.

Le grand Maître du théâtre et du cinéma passionné par le dialecte napolitain qu’il sauva de la désuétude, s’éteint en octobre 1984. Le Sénat dresse une chambre mortuaire ardente et ses obsèques seront retransmises en directe à la télévision italienne.

FILMOGRAPHIE :

En qualité d’acteur au cinéma :

1932 - Tre Uomini in frak (Trois hommes en frac) de Mario Bonnard avec Assia Noris

1934 - Il cappello a tre punte (Le tricorne) de Mario Camerini avec Leda Gloria

1935 - Quei due de Gennaro Righelli avec Leda Gloria

1936 - Una commedia frai i pazzi de avec Assia Noris

1937 - Sono stato io! de Raffaello Matarazzo avec Titina De Filippo

1938 - L'amor mio non muore... (Mon amour n’est pas mort) de Giuseppe Amato avec Alida Valli

1938 - Il marchese di ruvolito de Raffaello Matarazzo avec Eli Parvo

1941 - Il sogno di tutti d' Oreste Biancoli & Laszlo Kish avec Paolo Stoppa

1942 - A che servono questi quattrini? d' Esodo Pratelli avec Paolo Stoppa

1942 - Casanova farebbe cosi! de Carlo Ludovivo Gragaglia avec Clelia Matagna

1942 - Non ti pago! (Je ne te paye pas!) de Carlo Ludovico Bragaglia avec Paolo Stoppa

1943 - Non mi muovo! de Giorgio Simonelli avec Venna Vanni

1945 - La vita ricomincia (La vie recommence) de Mario Mattoli avec Fosco Giachetti

1946 - Uno tra la folla d' Ennio Cerlesi et Piero Tellini avec Adriana Benetti

1947 - Assunta Spina de Mario Mattòli avec Anna Magnani

1948 - Campane a martello de Luigi Zampa avec Yvonne Sanson

1949 - Yvonne de la nuit de Giuseppe Amato avec Frank Latimore

1951 - Cameriera bella presenza offresi... de Giorgio Pàstina avec Vittorio De Sica

1952 - Le ragazze di piazza di Spagna (Les fiancés de Rome) de Luciano Emmer avec Mercello Mastroianni

1952 - Cinque poveri in automobile de Mario Mattòli avec Walter Chiari

1953 - Villa Borghese de Gianni Franciolini avec Anna Magnani

1953 - Tempi nostri - Zibaldone N 2 (Quelques pas dans la vie) d’Alessandro Blasetti avec Totò,

1953 - Traviata 53 (Fille d’amour) de Vittorio Cottafavi avec Armando Francioli

1954 - Cento anni d'amore (épisode de la Purification) de Lionello De Felice avec Vittorio De Sica

1954 - L'oro di Napoli (L’or de Naples) de Vittorio de Sica avec Totò

1955 - Cortile d’Antonio Petrucci avec Marisa Merlini

1958 - L’uomo dai calzoni corti - L’amore più bello de Glauco Pellegrini avec Memmo Carotenuto

1959 - Ferdinando I re di Napoli de Gianni Franciolini avec Vittorio De Sica

1960 - Tutti a casa (Tout le monde à la maison) de Luigi Comencini avec Claudio Gora

1960 - Fantasmi a Roma de Antonio Piertangeli avec Vittorio Gassman

1984 - Cuore de Luigi Comencini avec Johnny Dorelli

En qualité de réalisateur :

1939 - In campagna e' caduta una stella avec Rosina Lawrence

1944 - Ti conosco, mascherina! (+ acteur et scénariste) avec Paolo Stoppa

1950 - Napoli milionaria! (Naples millionnaire) avec Totó

1951 - Filumena Marturano (Madame Philomène) avec Tamara Lees

1952 - I sette peccati capitali (Les sept péchés capitaux- film à sketchs - + acteur) de Yves Allégret, Claude Autant-Lara,

Eduardo De Filippo, Jean Dréville, Georges Lacombe, Carlo Rim, Roberto Rossellini avec Viviane Romance

1952 - Marito e moglie (Mari et femme) (+ acteur et scénariste) avec Vittorio Caprioli

1952 - Ragazze da marito avec Anna Maria Ferrero

1953 - Napoletani a Milano (+ acteur et scénariste) avec Frank Latimore

1954 - Questi fantasmi (Co-scénariste) avec Regina Bianchi

1958 - Fortunella avec Giulietta Masina

1959 - Il sogno di una notte di mezza sbornia (+ acteur) avec Pupella Maggio

1959 - Chi é cchiù félice é me! avec Valeria Moriconi

1965 - Oggi, domani, dopodomani (Aujourd’hui, demain, après-demain) de Luciano Salce, Marco Ferreri et Eduardo de

Filippo avec Marcello Mastroianni

1966 - Spara forte, più forte... non capisco! avec Leopoldo Trieste

1975 - Uomo e galantuomo avec Linda Moretti

1977 - Natale in casa Cupiello (Noël chez les Cupiello) avec Pupella Maggio

Télévision :

1955 -1956 Théâtre en direct

1956 - Six téléfilms

1959 – Poésie à la télévision

1959 - Théâtre en direct

1962 - Le théâtre d’Eduardo. Premier cycle

1963 - Téléroman

1964 - Le théâtre d’Eduardo. Second cycle

1975 - Le cycle “Scarpettiano”

1975 - 1976 - Le théâtre d’Eduardo. Troisième cycle

1977 - 1981 Le théâtre d’Eduardo. Quatrième cycle

1977 - Poésie à la Télévision

1979 - Soirée d’honneur « Eduardo De Philippo »

1984 - Poésie à la Télévision

RECOMPENSES et NOMINATIONS :

- Grand Prix du théâtre «Pirandello» en 1974

- Docteur «honoris causa» de l’Université de Birmingham le 15/7/1977

- Docteur «honoris causa» de l’Université de Rome en 1980

- Nommé Sénateur à vie en 1981 au siège du Sénateur Eugenio Montale

- Prix Pietro Bianchi par le syndicat national italien des journalistes de cinéma, Italie (1981)

- Noisette d’Or d’Honneur au festival du cinéma de Giffoni, Italie (1983)